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Table ronde « Intermédialités : l'intime et le politique dans les arts numériques »


L'intime sous le regard de l'autre, une éthique ancienne

Oriane  Deseilligny
GRIPIC - CELSA

La médiatisation d'une parole subjective, individuelle a pu être qualifiée de « surexposition de l'intimité » (Tisseron, 2001) dans un contexte médiatique contemporain qui interroge les frontières contemporaines de l'intime mais qui nous invite aussi à être prudents dans la réflexion sur ces problématiques complexes. Les premiers sites de journaux personnels publiés sur le web jusque vers 2003, puis les blogs intimistes qui ont pris leur relais illustrent cette dynamique « expressiviste » (Allard, Vandenberghe, 2003) qui ouvre au lecteur l'espace intime, le font participer et réagir. À travers ces dispositifs d'auto-publication les émotions, les expériences, les sensations sont mises en discours et par là mises à distance. Comment penser aujourd'hui cette articulation de l'intime et de la communication qui recourt à un dispositif médiatique inédit ?

Inscrire l'écriture de blogs intimistes ou de journaux personnels en ligne dans un cadrage historique et culturel long permet de mieux saisir les enjeux actuels et les usages des dispositifs médiatiques d'écriture et de lecture. Car, ainsi que Michel Foucault l'indique, « il y a une technologie de la constitution de soi qui traverse les systèmes symboliques tout en les utilisant » (Foucault, 2001). En l'occurrence la réflexion qu'il mène sur les techniques de subjectivation et notamment les pratiques d'écriture de soi (Foucault, 1983) est éclairante pour étudier les premiers journaux personnels publiés sur le web, puis les blogs.

Hybridant les deux formes de l'écriture de soi décrites par Foucault – les hypomnêmata et la correspondance – (Deseilligny, 2008, 2010), les premiers journaux personnels  publiés sur le web (1998-2003) déploient un geste de réflexivité placé sous le regard de lecteurs extérieurs. Dans leurs formes intimes et dans une certaine continuité par rapport à des pratiques scripturaires anciennes (journal, lettre), les blogs constituent également des avatars modernes de cette technologie de soi, dans lesquels se rencontrent désir de réflexivité et besoin de transitivité au service de la construction de la subjectivité. Ils prolongent l'exploration de l'intime menée dans les premiers journaux personnels publiés en ligne par des échanges rendus publics avec les lecteurs, via les commentaires désormais lisibles et visibles.

Dans la perspective foucaldienne, l'écriture de soi procède d'une volonté de connaissance de soi, d'une réflexivité dénuée d'égotisme, par laquelle il s'agit avant tout d'assurer la rectitude de sa vie morale en écrivant ses actions et ses pensées, en les rendant publiques. Le souci de soi qu'il décrit est en effet traversé par la présence de l'Autre : l'autre comme « directeur de conscience, l'autre comme correspondant à qui l'on écrit et devant qui l'on se mesure à soi, l'autre comme ami secourable, parent bienveillant [1] ». Est esquissé par là un espace qui articule l'intime à l'altérité : la construction de l'identité dans son intimité passe aussi par une dépossession de soi à travers le regard et au contact de l'autre. Il ne s'agit pas ici de verser dans l'anachronisme mais d'identifier dans des pratiques d'écriture personnelle un geste commun qui se donne comme un moyen d'appropriation et de maîtrise de sa vie psychique – dans le cas des blogs – par le partage et l'échange. Dans cette perspective et à rebours des idées reçues, dans notre contexte contemporain, l'intime se définit alors moins comme un espace clos que comme un rapport à soi et à l'autre.

Loin d'être synonyme de retrait, de solitude ou d'isolement, l'écriture de soi est en outre analysée par Foucault comme une éthique au service de l'action permettant : « (…) de mesurer au plus juste la place qu'on occupe dans le monde et le système de nécessités dans lequel on est inséré [2] ». La connaissance de soi qu'il décrit protège le sujet en préservant un rapport à soi inaliénable et en le dotant d'une certaine distance critique répondant à un principe éthique, voire politique. Car on peut donner à ces pratiques une connotation politique dès lors qu'elles sont envisagées comme manifestations d'une liberté qui se soustrait aux systèmes d'allégeance et aux conventions qui régissent la vie sociale. (Foessel, 2010). Dire l'intime dans l'espace public c'est aussi affirmer que l'autre que moi peut intervenir dans l'élaboration de mon individualité et que son regard est précisément un besoin dans l'espace public, hors des procédures et modalités habituelles qui régissent les échanges.


Références bibliographiques

Allard Laurence, Vandenberghe Frédéric, « Express yourself ! Les pages perso entre légitimation technopolitique de l'individualisme expressif et authenticité réflexive peer to peer », Réseaux, n° 117, 2003, pp. 191-219.

Deseilligny Oriane, « Le blog intime au croisement des genres de l'écriture de soi » in Couleau Christèle & Hellegouarc'h Pascale (dir.), Les blogs, un nouvel espace littéraire?, Itinéraires LTC, Paris, L'Harmattan, 2010.

Deseilligny Oriane, « Du journal intime au blog : quelles métamorphoses du texte ? », Communication & Langages, n° 155, mars 2008, pp. 45-62.

Foucault  Michel, « À propos de la généalogie de l'éthique : un aperçu du travail en cours », Dits et Écrits II, Paris, Gallimard, coll. "Quarto", 2001.

Foucault  Michel, « L'écriture de soi », Corps écrit, n° 5, février 1983, pp. 3-23.

Foessel Michaël, La privation de l'intime. Mises en scène politiques des sentiments, Paris, Seuil, 2008

Tisseron Serge, L'intimité surexposée, Paris, Fayard, 2002.



Médiatisations de l'intime sur la scène contemporaine

Charlotte Bomy
Université de Strasbourg

Quel vocabulaire plus adapté que celui du théâtre pour évoquer les stratégies politiques d'exhibition de soi ? Que ce soit dans les « mises en scène amoureuses des hommes politique » [3] ou à travers les dramaturgies des plateaux de télévision, l'exhibition de l'intimité est minutieusement chorégraphiée par la société médiatique ; elle relève du simulacre, de l'illusion, d'un art de la représentation avec ses déguisements, ses artifices et ses trucages. Du côté des arts de la scène, c'est paradoxalement la recherche d'authenticité qui est revendiquée par bon nombre de praticiens aujourd'hui : authenticité de la présence, et même de la « co-présence », d'une l'interaction unique entre acteurs et spectateurs. Les propositions scéniques pour favoriser la rencontre réelle sont variées et se font parfois sur un mode virtuel, empruntant aux nouvelles technologies et aux médias optiques – pensons, par exemple à certains spectacles de Heiner Goebbels (Eraritjaritjaka, 2004), de René Pollesch (Prater Saga 1-5, 2005), de Guy Cassiers (Rouge décanté, 2006) ou encore de Stefan Kaegi (Radio Muezzin, 2008).

L'intimité de l'acteur est généralement exhibée au public grâce à la présence d'un ou de plusieurs caméramans sur le plateau qui capturent l'image en direct et permettent sa retransmission simultanée à une échelle plus grande sur un écran de projection. Depuis le début des années 2000, ce procédé appelé live-video a particulièrement été développé par Frank Castorf, directeur berlinois de la Volksbühne am Rosa-Luxembourg-Platz, chez qui les moyens du cinéma « travaillent » la représentation – on pense notamment à la « saga russe » inspirée par Dostoïevski et Boulgakov [4], ainsi qu'au diptyque consacré à l'œuvre de Tennessee Williams avec les mises en scène Endstation Amerika (2000) et Forever Young (2003). L'intrusion d'un ou de plusieurs écrans vidéo permet de dépasser les cadres traditionnels de la représentation, d'apporter un nouveau degré de complexité au spectacle et à sa réception. Le spectateur assiste au dédoublement des comédiens, à la fois présents dans un éloignement réel (sur scène) et dans une apparente proximité (en gros plan à l'écran). La médiatisation du comédien par l'outil vidéo renouvelle la frontalité habituelle au théâtre, offre une plongée inédite et intimiste dans l'action scénique. Dans le spectacle Forever Young par exemple, le gros plan filmique permet d'approcher le visage des acteurs au plus près, de fragmenter leur corps par des plans de détails : la calvitie de Martin Wuttke, le maquillage dégoulinant de Katrin Angerer, le visage ravagé de Volker Spengler. L'« effet loupe » de la vidéo apporte un éclairage brutal, presque clinique sur la représentation (dont le thème est la fuite du temps et le caractère éphémère de la jeunesse). L'intime est surexposé, l'authenticité revendiquée est celle d'une réalité crue. Durant le spectacle, on est d'ailleurs amené à s'interroger sur ce que dit le comédien en tant que comédien, et non plus en tant que personnage fictif. Les acteurs s'interrompent dans le jeu et s'appellent par leur véritable prénom, commentent leur rôle, leur relation professionnelle dans la vie quotidienne. Le brouillage, la confusion entre la fiction et la réalité sont constants – entre, d'une part, l'histoire de la pièce de Williams Sweet Bird of Youth dans laquelle sont insérés des moments du film Apocalypse Now de Coppola, et des passages de « non-jeu » ou de dialogues authentiques entre les acteurs qui dé-jouent les codes de la représentation. Ces interférences font exploser les schémas habituels de narration : à la destruction de l'illusion théâtrale succède la déconstruction du personnage – un phénomène sans doute postmoderne, postdramatique même, que l'on retrouve dans les autres spectacles du metteur en scène allemand. Il se peut d'ailleurs que le véritable thème des pièces de Castorf soit le vertige de la simulation, le déclin ou la dissolution de la réalité face à l'omniprésence de l'image dans notre société médiatique. Ce type de théâtre incorporant les médias se ferait en quelque sorte l'écho critique d'une société théâtralisée à l'extrême – la « médiatisation du théâtre » répondant ici à la « théâtralisation des médias » pour reprendre les termes de Joachim Fiebach [5].

Dans de nombreux spectacles aujourd'hui, l'outil vidéo permet en définitive une extension du champ du visible et multiplie les possibilités du voir : c'est le spectateur qui doit recoller les morceaux des images et des histoires fragmentées, en supportant les passages d'un médium à un autre ou les ruptures de narration. Un spectateur actif et non un consommateur passif de visibilités.


Fragments et tensions dans la textualité numérique

Gaétan Darquié

Université Paris 8
Laboratoire Paragraphe-citu

Avec Star Wars One letter at a time [6], Kim Stefans réalise une œuvre textuelle dont le concept se résume très simplement: faire défiler lettre par lettre, en noir sur fond blanc, l'intégralité du manuscrit de l'épisode IV de la fameuse saga de George Lucas. L'œuvre est réalisée en Flash. Le défilement est accompagné de bruitages qui rappellent le son d'une machine à écrire : à chaque fin de ligne, une sonnerie retentit et le rouleau se remet en place.

Cette longue enfilade de lettres noires sur fond blanc est précédée d'une page de titre assez courte où l'on voit le nom de l'œuvre apparaitre intégralement, en un seul bloc, toujours sur une page vide, le titre faisant ainsi office, si ce n'est de consigne, tout du moins, de rapide introduction explicative.

Le texte lancé, le lecteur n'a plus aucun contrôle. Il ne peut en aucun cas agir sur la vitesse de défilement des caractères, ni même choisir le passage qu'il souhaite lire. Il est prisonnier de l'œuvre, contraint de « subir » le texte qui avance comme un rouleau compresseur, sans retour possible.

Le lien que l'œuvre tisse avec son lecteur est troublant car non content de restreindre la possibilité d'action du lecteur, il le frustre. La lecture du texte, lettre par lettre est réalisée de manière suffisamment fine pour que le lecteur retrouve toujours, au moment où il s'apprête à lâcher prise, quelques unes des célèbres phrases/phases du film, ce qui ne manque jamais de lui donner l'impression qu'il est possible de saisir quelque chose, malgré tout, que l'entreprise n'est pas complètement vaine, que le texte n'est pas seulement complètement illisible, mais qu'il est aussi et surtout pénible, d'une pénibilité redoutablement efficace, et que c'est lui, le lecteur, qui échoue à en restituer le sens.

Cette frustration agit ainsi comme une sorte de métaphore presque physique, ressenti par le corps, et exprimant la complexité des relations qu'établissent avec un tout unifié, global et plein de sens (dans notre cas le scénario) des éléments fragmentaires qui n'ont plus de sens sans leur contexte (les lettres). Dans ce cas, c'est la lecture elle-même en tant qu'acte qui devient expérimentation.

Mais la frustration n'est pas le seul recours pour le lecteur de littérature numérique. Dans Le plaisir du texte, Barthes évoque, pour le lecteur deux types de plaisir possibles, un premier qu'il qualifie de « jouissance »  et qui se joue dans la déconstruction et la mise en doute d'un objet qui dérange le lecteur, et un second qui, au contraire, travaille le confort de ce dernier, en arrive à dépasser son espérance en représentant mieux, c'est-à-dire, par delà ses attentes l'objet même de son désir.

Si One letter at a time rappelle plus la jouissance, une œuvre comme Dakota [7] de Young-Hae Chang, Heavy Industry nous fait plus pencher pour le second type de plaisir ; en effet, il s'agit cette fois non plus de perdre le lecteur au niveau du fragment et du partiel en mettant en perspective l'échec de son appréhension d'une unité globale mais bien plutôt de tirer partie de l'absence de perception de ce tout, pour conforter au mieux ce lecteur dans le fragment. A la manière de la musique qui est d'ailleurs extrêmement importante dans cette création, l'œuvre se donne immédiatement, elle se perd sans cesse en même temps qu'elle se re-gagne, à chaque nouvel écran, et si l'on avance (si) vite, c'est bien pour fuir la tentation d'une mémoire (trop) réunificatrice. Bien sûr c'est l'accumulation des fragments qui finit par poser l'œuvre, mais cette accumulation s'avère complexe et trouble ce qui par ailleurs ne l'empêche pas de s'effectuer de manière naturelle et douce ; le texte se répète souvent, pour porter le lecteur, l'accompagner sur le « bon chemin ». La limitation de sa liberté, n'est plus ressentie de la même manière, au contraire elle devient guide rassurant qui balise et commente le parcours.

Mais cette passivité restrictive n'est pas loi absolu dans le numérique : le recourt à des opérations interactives est tout à fait possible. Dans 20 ans après [8] par exemple, Sophie Calle laisse le choix au lecteur de suivre ou non la narration « conventionnelle » (celle qui mène de fin en début de page). En effet le lecteur peut, à l'aide d'un menu situé en bas de l'écran, se rendre à presque n'importe quel moment, sur n'importe quel fragment de texte de l'œuvre hormis l'introduction. Le parcours interactif est soigneusement travaillé.

Le sujet ? Il y a vingt ans, Sophie Calle a demandé à sa mère d'employer un détective pour la filer toute une journée. Tout en s'amusant à imaginer qui et où pouvait se trouver le détective, elle rend compte des faits qu'elle juge elle-même importants dans un carnet, à la fin, elle compare ses notes avec celles du détective. Vingt ans plus tard, elle se risque au même jeu, en travaillant l'écho produit à la fois par l'écart entre ses notes et celles du détective et par la mise en perspective avec la mémoire de l'expérience déjà pratiquée deux décennies plus tôt.

Elle construit deux ensembles situés à des niveaux différents (les notes et la mémoire/expérience) mais dont chacun des composants s'équivaut (les notes d'il y a vingt ans, les notes d'aujourd'hui, la mémoire de l'expérience passée et le vécu de celle d'aujourd'hui), le tout gravitant autour du moi de l'auteur.

L'expérience de Sophie Calle, contrairement à la première œuvre où il s'agissait d'une installation avec texte et photographie, prend la forme, vingt ans plus tard, d'un texte numérique élaboré en flash et publié sur Internet [9].

Pour conclure plus finement, il aurait fallu continuer d'explorer cet espace (et parler des nombreuses autres aventures textuelles numériques qui ne cessent d'agiter le web tous les jours : les statuts Facebook de Claro, le Tiers Livre de François Bon, les détournements en 140 caractères sur Twitter, le travail littéraire de l' « école J. Cayley » sur le code, le « corps-texte » changé en corps virtuel dans Second Life avec S. Baldwin …) et de vérifier que, dans la plupart de ces œuvres, se pose de manière centrale la question de la distance, et du rapport entre globalité et fragment(s). Une interrogation pouvant se lire de manière symbolique : à l'ère des réseaux, il est évident que la question de l'individu, de l'intime, se pose. Comment intègre-t-il, participe-t-il et, pourquoi pas, résiste-t-il à la communauté ?

La vision post-moderne de l'effondrement de Babel et de l'avènement du fragment est évidement très présente dans ces œuvres, toutefois il serait dommage de les réduire à cette seule dimension, les rapports entre partie et tout, ne constituent pas des structures aussi parfaitement ordonnées et hiérarchisées que les étages d'une maison. Il n'y pas non plus de fractale parfaite, mais plutôt des enjambements et des diagonales, des correspondances floues, des tensions et jeux de pulsion répulsion, entrelacs complexes rappelant plus l'écriture d'un Antonin Artaud, que celle d'un Balzac ou d'un Zola. L'écriture numérique bouscule les étages et les hiérarchies, elle rend à la partie puissance et dignité en lui donnant les moyens de se confronter à la tyrannie du tout unifiant et met en évidence, à travers plusieurs « œuvres/contreverses » ce que Bruno Latour n'hésiterait sans doute pas à qualifier de « connexions sociales traçables ». [10]

De plus, et c'est sans doute l'un des grands enjeux (de la poétique) de la textualité numérique, les programmes, les langages informatiques, les codes qui sont derrière les nouvelles technologies de demain, ne sont pas purement numériques mais sont bel et bien textuels ! La « pensée » qui les fonde n'a, jusqu'à aujourd'hui, que peu de remords, dans son souci d'efficacité, à continuer de se satisfaire de résultats culturellement bien trop superficiels. Le travail de remise en cause et le dépassement de cette « fonctionnalité pure » rêvée n'est possible que par le biais d'un véritable questionnement sur ce qui lie, qui connecte et qui produit les tensions entre ensembles.

L'interrogation sur le langage, sa capacité à réfléchir, à produire des imaginaires et à se réfléchir lui-même (sa poéticité) permettrait justement, de traiter, dans un contexte numérique, cet aspect.

Intime et politique se confondent et se fusionnent pour mieux coexister et s'interpénètrent ou s'effleurent avec une tension qui rappelle celle entretenue entre la langue soutenue et le code qui la porte. Travailler l'un de ces liens revient à travailler l'autre.

En s'appropriant certains des champs liés aux écritures informatiques, la littérature peut avec brio interroger la notion même de rapport avec une singularité renouvelée et une contemporanéité séduisante, que ce rapport soit entre humains, êtres vivants, langages ou choses ; l'univers du numérique ne doit plus juste effrayer et repousser, même et surtout au sein de la littérature, il peut encore se construire sur et avec des langages en attente de poétique: s'ils acceptent d'embrasser aussi, en plus des langues établies, les HTML, CSS, PHP, JavaScript, Action Script 3, C, C++, Python, Java, Rubis et autres langues « barbares » (Ajax ?), que les écrivains ou/et chercheurs en littérature ne s'inquiètent pas, ils n'en continuerons pas moins d'apprécier avec le même panache Kafka, Flaubert, Joyce et Beckett, sans doute même, contribueront-ils toujours avec autant, si ce n'est plus de plaisir et de réussite à ce petit rien si essentiel que la littérature n'a jamais abandonné : se réinventer elle-même pour réinventer tout.


Références bibliographiques

BARTHES, Roland, Le plaisir du texte, Paris, Points, 1982.

LATOUR, Bruno, Changer de société, refaire de la sociologie, Paris (édition française), Editions La Découverte, 2006-2007

Références aux sites Internet

STEFANS, Brian Kim, Star Wars, one letter at a time, 2005, consulté le 1er juillet 2010.

Y0UNG-HAE CHANG HEAVY INDUSTRIES, Dakota, consulté le 1er juillet 2010.



[1] Frédéric GROS, « situation du cours », in Michel FOUCAULT, L'herméneutique du sujet, Cours au Collège de France, 1981-1982, Paris, éditions de l'EHESS, 2001.

[2] Ibid ., p. 518.

[3] Michaël Fœssel, La privation de l'intime, Paris, Seuil, 2008, p. 14.

[4] Le cycle de Frank Castorf inspiré par de grands romans russes comprenait cinq spectacles qui font partie du répertoire de la Volksbühne : Dämonen (Les Démons) en 1999, Erniedrigte und Beleidigte (Humiliés et offensés) en 2001, Der Idiot (L'Idiot) en 2002, Der Meister und Margarita ( Le Maître et Marguerite) en 2002 et Schuld und Sühne (Crime et Châtiment) en 2005.

[5] Joachim Fiebach, „Kommunikation und Theater. Diskurse zur Situation im 20. Jahrhundert" (1989), in : Keine Hoffnung, keine Verzweiflung: Versuche um Theaterkunst und Theatralität, Berlin, Vistas, 1998, p. 86.

[8] L'œuvre, longtemps accessible sur le site de panoplie.org n'est malheureusement plus, à ma connaissance, disponible sur le web à ce jour.

[9] Avec le texte de Kim Stefans, nous retrouvions le même procédé de mise en abîme de deux types d'outils de création différents : la machine à écrire inscrite dans l'œuvre flash.

[10] Latour, 2006-2007, p.28



POUR CITER CET ARTICLE

Table ronde « Intermédialités : l'intime et le politique dans les arts numériques », Le Texte étranger   [en ligne], n° 8, mise en ligne janvier 2011.
URL : http://www.univ-paris8.fr/dela/etranger/pages/8/intermedialites.html